Les plus récentes données de Markit Economics (indices PMI) sur l'évolution de l'économie américaine indiquent que la croissance au troisième trimestre est tout aussi faiblarde ou modeste qu'au premier semestre.
https://www.markiteconomics.com/Survey//PressRelease.mvc/9f6f960aec03459f83aea032471cd719
En revanche, pour les gens qui préfèrent des scénarios plus optimistes, les estimations de croissance de l'Atlanta Fed et de la New York Fed, pour ce trimestre-ci, sont, ces jours-ci, à plus ou moins 3 % en rythme annuel.
Le Bureau of Economic Analysis a indiqué, le 26 août, que l'économie américaine a crû de 0,27 % (1,1 % en rythme annuel) au deuxième trimestre et de 0,2 % (0,8 % en rythme annuel) au premier.
Des commentaires sur les indicateurs avancés de l'évolution à court terme de l'économie, ainsi que sur les perspectives et les prévisions économiques, voilà ce que je vous propose de lire dans mon blog. Je ne peux cependant résister à la tentation de commenter parfois d'autres aspects de l'évolution de l'économie.
vendredi 26 août 2016
dimanche 14 août 2016
Productivité et rémunération : une comparaison Québec-Ontario
Cet article a été rédigé par Jules Dufort et Jean-Pierre Furlong.
Rappel
L’article de Jules Dufort, publié le 27 juin dernier sur le site Internet de l'Association des économistes québécois*, portait sur les pièges à éviter dans le calcul et l’analyse de la productivité du travail. Il y indiquait que le niveau de la productivité du travail s'obtient en divisant la valeur de la production par les intrants de travail. En pratique, on la mesure en divisant le PIB nominal[1] évalué aux prix de base par les heures travaillées. Les prix de base reflètent la réalité du système de production, soit les prix aux producteurs à la sortie de l’unité de production.
Il examinait également dans cet article les trois conditions de base à respecter pour réaliser des comparaisons entre le Québec et l’Ontario. Ces trois conditions sont les suivantes :
·
les comparaisons doivent se limiter au secteur des
entreprises commerciales, ce qui exclut les administrations publiques, les services
publics de santé et d’éducation ainsi que les entreprises à but non lucratif;
·
elles doivent tenir compte des différences de
structure industrielle (c'est-à-dire des différences dans l’importance relative
des industries), ce qui se fait essentiellement en répartissant les heures travaillées
entre les industries au Québec de la même manière qu’en Ontario[2]
;
et,
·
les prix obtenus par les producteurs de biens et de services
doivent être identiques au Québec et en
Ontario, ce qui toutefois se
vérifie mieux dans le secteur des biens
que dans celui des services en raison de la forte concurrence pour le commerce des
biens découlant de la mondialisation et de la concurrence interprovinciale.
Depuis, nous avons obtenu des compilations spéciales de
Statistique Canada[3]
nous permettant :
·
de
comparer adéquatement ici les niveaux de productivité et la rémunération du
travail au Québec et en Ontario, pour dix-neuf industries productrices de biens et
services. La fabrication, l’une des dix-neuf, est à son tour subdivisée en
dix-neuf catégories; et,
·
de vérifier l’hypothèse que l’économie du
Québec est globalement aussi productive que celle de l’Ontario.
Le tableau présenté ci-dessous indique bien que lorsque l’on tient compte des différences de structure industrielle, le rapport Québec/Ontario de la richesse ou la production par heure travaillée augmente. Pour les biens et services pris globalement, le rapport passe de 94,5 % à 97,4 % en 2012. Le tableau révèle aussi que la productivité est nettement plus élevée au Québec dans la production de biens. C’est le cas d’ailleurs pour quatre des cinq industries de ce secteur, soit :
·
l’agriculture, la foresterie, la pêche et la chasse,
·
l’extraction minière, l’exploitation en carrière et
l’exploitation de pétrole et de gaz,
·
les services publics et
·
la construction.
Dans les industries de services, les prix peuvent avoir tendance à être plus élevés en Ontario qu’au Québec, ce qui expliquerait, du moins en partie, le fait que la productivité du travail soit plus faible au Québec dans ce secteur. Si la moitié de l’écart de productivité entre le Québec et l’Ontario dans le secteur des services (3,4 des 6,8 points de pourcentage d’écart) provenait de la présence de prix de vente plus faibles pour les producteurs de services du Québec[4], le niveau de productivité de l’ensemble du secteur des entreprises commerciales serait identique au Québec et en Ontario (à 99,97 % pour être plus précis). Ainsi, l’hypothèse que la productivité soit aussi élevée au Québec qu’en Ontario tient la route.
Productivité
et rémunération horaires du travail
Rapport
Québec-Ontario pour les entreprises commerciales
Exprimé en %,
2012
Productivité
|
Rémunération
|
|||
1
|
2
|
1
|
2
|
|
Biens
|
104,5
|
106,3
|
97,1
|
98,8
|
Services
|
88,6
|
93,2
|
90
|
93
|
Biens et services
|
94,5
|
97,4
|
92,9
|
94,9
|
2 En tenant compte des différences de structure industrielle
Résultats sur la rémunération du travail
Tout comme pour la productivité, tenir compte des différences dans l’importance relative des industries a pour conséquence de rapprocher la rémunération du travail[5] au Québec de celle de l’Ontario. Pour les biens et services pris globalement, la rémunération horaire au Québec passe de 92,9 % à 94,9 % de celle de l’Ontario en 2012 (référence, tableau ci-dessus). Il n’y a que dans quatre des dix-neuf industries examinées où la rémunération horaire est plus élevée au Québec. Dans l’industrie de la fabrication, il n’y a que dans quatre des dix-neuf catégories de production où la rémunération québécoise devance celle de l’Ontario.
Productivité
et rémunération
On peut aussi déduire des pourcentages précédents que
pour l’ensemble des entreprises, notamment les producteurs de biens, la
rémunération horaire est inférieure, au Québec par rapport à l’Ontario, à ce à
quoi l’on pourrait s’attendre en tenant compte de la production ou de la
richesse créée par heure travaillée.
Toutes choses étant égales par ailleurs, si la
productivité québécoise correspond à 97,4 % de celle de l’Ontario, la
rémunération horaire devrait aussi se
situer à 97,4 %. Or, elle n’est qu’à 94,9 % de celle de l’Ontario. L’ampleur de
la différence est encore plus difficile à expliquer lorsqu’on se limite aux
biens. La productivité du travail y est plus élevée au Québec (106,3 % de celle
de l’Ontario), mais la rémunération horaire y est inférieure (98,8 % de celle
de l’Ontario). Pour les producteurs de services, la différence de productivité
s’accompagne, à première vue, d’un écart pratiquement identique de
rémunération horaire.
À un niveau plus détaillé d’analyse, toujours au
Québec par rapport à l’Ontario, la rémunération horaire est inférieure à la
richesse créée par heure travaillée pour treize des dix-neuf industries de
biens et services analysées (c’est le cas pour quatre des cinq industries de
biens et pour neuf des quatorze industries de services).
Conclusion
Les entreprises commerciales du Québec sont, dans leur
ensemble, vraisemblablement tout aussi productives que celles de l’Ontario
lorsque l’on tient compte des différences de structure industrielle et des prix
relatifs des services. Par ailleurs, compte tenu de la richesse créée par heure
travaillée, les travailleurs québécois sont moins bien rémunérés que leurs
homologues ontariens et ce, dans un grand nombre d‘industries.
*Lien vers l'article du 27 juin dernier :
http://blogue.economistesquebecois.com/2016/06/27/comparaisons-de-la-productivite-du-travail-des-pieges-a-eviter/#more-5186
http://blogue.economistesquebecois.com/2016/06/27/comparaisons-de-la-productivite-du-travail-des-pieges-a-eviter/#more-5186
[1] Seules les données sur le PIB nominal aux prix de base par
industrie permettent de comparer les niveaux de productivité entre les
provinces, conformément à ce que Statistique Canada et l'OCDE prescrivent.
[2] Pour éliminer les
différences de structure industrielle, nous calculons, à partir des niveaux de
productivité et de rémunération observés au Québec pour chacune des trente-sept
industries analysées (voir la note 3),
le niveau théorique de productivité et le niveau théorique de
rémunération obtenus pour le Québec lorsqu’on répartit les heures travaillées
entre les industries au Québec de la même manière qu’en Ontario. Il existe plusieurs
méthodes pour tenir compte des différences de structure industrielle. Nous en
avons retenu une parmi les moins compliquées. Après avoir tenu compte des
différences de structure industrielle, nous évaluons l'écart de
productivité entre le Québec et l'Ontario à 2,6 % et l'écart de rémunération à
5,1 %. Pour sa part, Statistique Canada, en nous transmettant les données
nécessaires à notre étude, a évalué, à l'aide de calculs fort complexes,
l'écart de productivité à 2,7 % et l'écart de rémunération à 4,9 %. Pour ce
faire, Statistique Canada a utilisé une formule de calcul élaborée par
des chercheurs australiens en 2007. Cette formule de décomposition des écarts
de productivité permet, elle aussi,
de départager les différences de structure industrielle des écarts de
productivité réels. Elle provient d’un article de Ben Dolman, Dean Parham et
Simon Zheng, intitulé «Can Australia
Match US Productivity Performance?» Staff Working Paper, Australian
Productivity Commission, mars 2007, annexe B.2, pages 77-79.
[3] Les données utilisées par Statistique Canada
pour effectuer les compilations proviennent de la dernière mise à jour du
modèle intersectoriel de l’économie canadienne et de celles des provinces.
Elles portent sur l'année 2012. Les données pour l’année 2013 seront
disponibles en novembre 2016. Au
niveau d'agrégation à deux chiffres du modèle intersectoriel, il y a dix-neuf
industries productrices de biens et services pour le secteur des entreprises
commerciales. La fabrication, l’une des dix-neuf, est subdivisée en dix-neuf
catégories au niveau à trois chiffres du modèle. Nous tenons compte des différences de structure
industrielle au niveau de ces trente-sept industries.
[4] Le coût de
location d'espaces à bureaux, commerciaux ou industriels, des produits
de l’industrie de l’immobilier servant également d’intrants dans la
production de nombreux services, ainsi que celui du logement sont beaucoup moins
élevés au Québec qu’en Ontario. De plus, la rémunération constitue une
composante fort importante du prix des services. Or, la rémunération est plus
élevée en Ontario qu'au Québec dans douze des quatorze industries de services. Le
prix des services est donc logiquement moins élevé au Québec. En conséquence, à
93,2 %, le ratio Québec/Ontario en ce qui concerne la productivité pour les
services est vraisemblablement sous-évalué. En effet, ce 93,2 % se justifie
uniquement lorsque le prix des services est identique au Québec et en
Ontario. Nous faisons l'hypothèse ici qu'il se chiffre à 96,6 %.
[5] La
rémunération du travail inclut les salaires et les contributions des
entreprises et des travailleurs autonomes aux cotisations sociales.
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